Adobe et le web

Hier soir, je suis tombé avec effroi devant cette bannière publicitaire :

Il y a tellement de choses de travers dans cette publicité. Adobe corrobore l’idée qu’écrire du code, c’est un inconvénient. Adobe véhicule l’idée que le code HTML est une conséquence de la conception web, et non la conception web en elle-même.

Je ne vais pas vous le cacher, je n’aime pas Adobe. Je n’aime pas leur modèle économique désuet qui consiste à vendre des logiciels près de 1000€. Je n’aime pas les interfaces honteuses de leurs logiciels. Je n’aime pas leurs formats propriétaires horriblement conçus. Je n’aime pas leur hypocrisie.

Mais surtout, je pense qu’Adobe n’a jamais rien compris au web.

La récente suractivité d’Adobe au sein du W3C est très intéressante, comme avec les filtres ou les régions CSS, même si ça ressemble aussi à une énième tentative désespérée de reproduire du print sur le web. C’est déjà un comportement moins pathétique que ça.

L’échec de Flash sur mobiles en est un bon exemple de l’incompréhension du web d’Adobe. L’horrible prototype Wallaby en est un autre. Et Muse n’en est qu’un supplémentaire.

Adobe Muse est un des derniers nés du Creative Cloud d’Adobe, disponible en abonnement pour 20$ par mois. La promesse d’Adobe est de pouvoir créer des sites « de qualité professionnelle, conformes aux derniers standards web » « sans savoir écrire de code ». En bon concepteur web, j’ai donc testé rapidement Adobe Muse en créant deux simples pages, avec un simple titre en Helvetica Neue et un paragraphe de Lorem Ipsum. Vous pouvez voir le résultat sur jsFiddle. Voici quelques remarques :

  • jQuery est inclus par défaut sur toutes les pages, même si vous n’en avez absolument pas l’utilité, ainsi qu’une plâtrée de JavaScript en dur dans chaque page.
  • Mon texte en Helvetica Neue a été transformé automatiquement en image. Ça pourrait être pertinent pour une page unique, mais comme j’utilise cette police ailleurs sur mon site, il aurait été plus pertinent d’opter pour l’inclusion une police en CSS.
  • Le code HTML est peu sémantique, et truffé de balises inutiles.
  • Le code CSS n’utilise pas tous les préfixes navigateurs (comme les horribles déclinaisons de device-pixel-ratio)
  • Quand vous créez un nouveau site dans Adobe Muse, la première chose qu’on vous demande, c’est la largeur et la hauteur de votre site web. Et moi qui croyais que j’allais faire du web.

Je ne vais pas y passer des heures, mais vous avez compris l’idée : on est loin, mais alors très loin du travail qu’un intégrateur professionnel doit réaliser. Alors bien sûr, il y a déjà eu pas mal d’améliorations dans Muse depuis son lancement en 2011. Mais je doute que le logiciel ne parvienne un jour à atteindre la qualité du travail d’un professionnel.

Et c’est là pour moi le problème. Adobe essaie de vendre Muse comme un logiciel professionnel. Muse n’est pas un logiciel professionnel. C’est un logiciel amateur, pour des amateurs, destiné à faire des sites de qualité amateur.

  1. PinGoo, le

    Faut bien qu’ils vendent leur merde monsieur !

  2. AkaiKen, le

    J’ai vu une fois le code d’un site fait en Muse, j’ai failli vomir. width: 1px sur tous les objets, position: absolute à tout va… Sérieux, apprendront-ils un jour ?

  3. Nico', le

    Tout est vrai… malheureusement.
    Petite info au passage : Ça serait cool d’avoir des boutons de partage sur tes articles, plus pratiques et plus rapide. Surtout sur un mobile.

  4. Rémi, le

    @Nico’ : Ça ne risque pas d’arriver.

  5. Julien, le

    Quand on voit que seul Adobe Edge Code est intéressant, pour l’instant je ne vois pas vraiment de différences avec Brackets , le projet original Open source …

    J’ai testé Edge Animation, tu prend la logique de flash appliqué a canvas: une grosse daube inutilisable.

    Ils ont pas retenu la leçon avec Dreamweaver ?

  6. Skoua, le

    Que ce soit Adobe ou n’importe qui d’autre, une page web en WYSIWYG sera crado et remplie d’éléments en position: absolute.
    Adobe vend ce genre de produits aux grands novices qui ne peuvent/veulent pas apprendre HTML et CSS.

    A côté de ça, Adobe a repositionné Flash vers ce qu’il sait vraiment faire et en a fait une sorte de sous Java pour les applications mobiles.
    Ils ont aussi sorti Edge Animate qui sera peut-être utile à la longue pour les animations très compliquées. http://html.adobe.com/edge/animate/

    Et leur business model a changé, quel intérêt de payer Photoshop 1500 euros alors qu’on peut l’avoir pour 20 euros par mois avec accès « gratuit » aux MAJ ?

    Autant Adobe a du retour dans le web, autant je trouve qu’ils prennent la bonne voie en ce moment.

  7. Bartdude, le

    Une fois n’est pas coutume, je suis entièrement d’accord avec tout le fond de ton article. Comme le dit aussi skoua, il est évident que web sémantique et wysiwyg ne font pas bon ménage, et ca ne sera sans-doute jamais le cas.

    Je voudrais simplement réagir sur ta conclusion, car trop souvent on oublie la signification première du mot « amateur » pour n’en garder que la définition péjorative. Un amateur est quelqu’un qui aime quelquechose, un passionné, pas (forcément) un dilettante… Et comme quand on aime, on ne compte pas, cela donne parfois (souvent ?) des projets « amateurs » bien mieux réalisés que des projets « professionnels », où des contraintes (financières souvent) viennent freiner la créativité ou tout simplement la qualité.
    Bref, les logiciels adobe (pour la plupart, tout n’est quand-même pas à jeter, et sans être un expert je ne vois par exemple pas de réel concurrent à Photoshop), en tout cas pour le web, ne sont pas plus destinés aux amateurs qu’aux professionnels, ils sont destinés au débutants, encore naïfs face au monde du web, et qui le resteront (car ce n’est pas en s’inspirant du code généré par ces brols que quiconque apprendra à se passer d’eux)

  8. RomSoul, le

    Les logiciels de ce type, qui s’acharnent à épargner à leurs utilisateurs la vision de la moindre ligne de code, finissent tous par se heurter au même paradoxe.

    Ce paradoxe c’est que même avec le meilleur et le plus intuitif (…et le plus cher ?) des logiciels, on ne peut pas à la fois mettre en œuvre des mécanismes sophistiqués ET se dispenser de comprendre leur fonctionnement .

    Au mieux, les utilisateurs les + experts de ce genre d’usine à gaz parviendront à mettre en œuvre ces mécanismes, mais en les maitrisant d’une façon détournée, incomplète, à travers le prisme et dans le « dialecte » du logiciel…
    Et surtout au terme d’un apprentissage qui n’aurait pas été plus long, ( mais certainement plus pérenne ) s’ils n’avaient pas été allergiques au code !

    En fait, ce type de logiciel est un sorte d’appareillage orthopédique pour les personnes souffrant d’allergie foudroyante au code ET de pulsions de webdesign irrépressibles :)

    Pour ma part, je leur recommanderai plutôt pour un résultat raisonnablement propre et pas cher d’opter pour un CMS facile d’accès, gratuit, et de chercher leur bonheur dans la pléthore de thèmes existants et customisables.

  9. lionelB, le

    « Mais surtout, je pense qu’Adobe n’a jamais rien compris au web. » c’est à mourir de rire :)

    Que tu n’aimes pas Adobe pourquoi pas, par contre ressortir les mêmes arguments, dont la plus part reflète le sentiment d’une petite minorité, je suis pas sur que ça serve ton argumentaire.

    Par contre un fois n’est pas coutume je suis assez d’accord sur le fait de dénoncer le BS commercial d’un outils (surtout quand Adobe fait sa campagne dessus > http://www.youtube.com/embed/nLk3AWskQw0?rel=0)

  10. Enguerran, le

    Le truc intéressant serait de connaître leurs ventes avec ce produit. C’est ni plus ni moins Dreamweaver en mode création (ou tout autre WYSIWYG), mais est-ce qu’en 2012 ces produits trouvent toujours acheteurs ? si oui, qui ?

  11. Draeli, le

    lionelB : « Que tu n’aimes pas Adobe pourquoi pas, par contre ressortir les mêmes arguments, dont la plus part reflète le sentiment d’une petite minorité » la majorité doit elle toujours avoir raison ? En l’occurrence la minorité représente des gens dont c’est le métier, dont c’est le gagne pain et pour qui les sites d’amateurs ne rendent pas service à la profession.

    Ce type de logiciel est réellement pour « amateur » et pour moi Adobe est une boîte qui n’a jamais essayé de se positionner face aux professionnels du Web en ce qui concerne la création de code. Alors oui le WYSIWYG est bien dans le principe mais le résultat est hallucinant en terme de code, l’exemple donné étant très parlant.
    Donc que Adobe vende un logiciel 1000€ à destination de professionnel SI (et uniquement SI) le logiciel fourni est de qualité et permet de coller aux besoins d’un professionnel d’accord mais à ce prix et vu la qualité, non seulement 1000€ n’est pas adapté mais même 20€ par mois ou 1 centime par mois c’est trop cher.

  12. lionelB, le

    Draeli, concernant la majorité, je faisait référence au gens ‘dont c’est le métier’ qui utilisent les logiciels adobe et qui sont assez content.

    Rémi part de cas particulier (le format photoshop, un mec qui répertorie les ratés de UI des soft et la politique tarifaire) pour généraliser
    – les formats d’adobe sont tous horrible (qui s’en soucis vraiment, je connais pas grand monde qui eu a parsé un fichier photoshop)
    – L’ui des soft est catastrophique
    – Les soft devrait coûter moins cher pourtant la formule cloud est très intéressante.

    « les sites d’amateurs ne rendent pas service à la profession. »
    C’est sur et c’est certainement pas la vocation, faut arrêter de croire que l’ensemble du web doit être comme vous le voudriez avec que des sites optimisés, ergonomiques, fait par des pros.
    Si à chaque fois pour mettre un site en ligne il fallait payer quelqun dont c’est le travail, le web ne ressemblerait certainement pas à ça aujourd’hui. C’est renier son essence et ce qui en a fait le succès, à savoir le fait que le gens se l’est approprié.
    Le HTML, le javascript sont des langages ultra permissif / avec des interpréteur tout terrain et c’est justement ce qui à mon sens en a fait le succès.

  13. Draeli, le

    lionelB : « C’est sur et c’est certainement pas la vocation, faut arrêter de croire que l’ensemble du web doit être comme vous le voudriez avec que des sites optimisés, ergonomiques, fait par des pros. »
    Qu’il ne le soit pas c’est une chose mais qu’on tende vers un idéal ça me semble normal. Alors c’est sur que le web ne ressemblerait pas à ce qu’il est aujourd’hui mais cela peut se faire valoir dans les deux sens et je reste persuadé que ce n’est pas en mettant en place des outils pondant du code « pourri » (les termes qui me viennent à l’esprit sont moins propres) qu’on va faire avancer le web dans le bon sens. Ce qui n’empêche pas à l’amateur de faire son truc, mais que AU MOINS qu’il apprenne à faire car ce type de logiciel ça revient plus ou moins à industrialiser le processus de pourrissage du web. Je ne pense pas que l’assistanat soit la solution pour faire du code et en tous cas Adobe et ses outils ne rentrent clairement pas dans ma vision du « bon assistanat ».

    Quand à la remarque sur le parsage de fichier Photoshop, personnellement j’ai déjà eu plusieurs fois le besoin de le faire mais comme tu le dis si bien le format est pourri donc au final même si tu as le besoin tu apprends à contourner le problème.

  14. Victor Brito, le

    Rémi, j’ai vu passer ton tweet affirmant qu’à chaque apparition de cette bannière publicitaire, un intégrateur se pendait. J’ai également jeté un œil à ton test et j’ai apprécié les classes clearfix et les valeurs des attributs id qui ne sont pas sans rappeler celles des id qu’on peut trouver sur des sites développés en .NET.

    Mais, une telle publicité pour un produit pareil ne m’effraie pas outre mesure. Ce n’est pas Adobe Muse qui tuera l’intégrateur (X)HTML / CSS. Si le WYSIWYG était une menace réelle, tous les intégrateurs et développeurs Web seraient passés à autre chose depuis fort longtemps.

  15. lionelB, le

    « Ce qui n’empêche pas à l’amateur de faire son truc, mais que AU MOINS qu’il apprenne à faire car ce type de logiciel ça revient plus ou moins à industrialiser le processus de pourrissage du web »
    @draeli, c’est pas dur à comprendre qu’une bonne partie des gens ça les intéresse pas la qualité du code, lui ce qu’il l’intéresse c’est utiliser, communiquer, mettre en ligne. Pas plus.
    Et seulement après, si les gens lui remontent des erreurs peut être que la personne qu’a mis en ligne son site, se penchera sur comment améliorer sa production, mais croire l’inverse me parait c’est penser que pour peindre il faut d’abord faire les beau arts. Sauf que les enfants peignent, les amateurs peignent et même si il font des bouzes, il se font plaisir…
    Je pense que réaliser un bon outils wysiwyg avec des fonctionnalités poussées n’est pas si facile que ça,Depuis plus 10 ans, je ne connais aucune tentative qui n’ai était un succès. La seule solution ça s’appelle l’huile de coude et c’est temps mieux.

    De quel assistanat tu parles, assister les codeurs ou les amateurs ? Je vois pas la différence en fait, je content de pas coder en assembleur ou même écrire des fichiers en binaire, ^_^ , non plus sérieusement, je pense que ce genre de logiciel ne cible pas les codeurs.

  16. Thierry, le

    @LionelB :

    « je pense que ce genre de logiciel ne cible pas les codeurs »

    Ça, c’est évident.

    « Je pense que réaliser un bon outils wysiwyg avec des fonctionnalités poussées n’est pas si facile que ça,Depuis plus 10 ans, je ne connais aucune tentative qui n’ai était un succès. »

    Un logiciel wysiwyg qui coderait correctement à la place d’un utilisateur ne sachant pas coder devait être intelligent.

    « C’est sur et c’est certainement pas la vocation, faut arrêter de croire que l’ensemble du web doit être comme vous le voudriez avec que des sites optimisés, ergonomiques, fait par des pros. »

    Les premiers dessinateurs de BD n’avaient pas fait les arts graphiques, les premiers acteurs de cinéma n’avaient pas fait les arts dramatiques, les premiers réalisateurs n’avaient pas fait d’études de mise en scène… mais ce n’est plus le cas.

    On peut regretter que la création se professionnalise, mais c’est une tendance qui touche tous les domaines d’expression. Cette évolution est le fait tant du public et des intermédiaires (pairs, producteurs, éditeurs, critiques) entre les créateurs et celui-ci (exigences de meilleure qualité technique ou de contenu) que des créateurs eux-mêmes, qui veulent faire mieux que ce que d’autres on fait ou que ce qu’ils ont fait jusque-là. Si Hergé s’amenait aujourd’hui dans une rédaction avec ses planches de « Tintin aux pays des soviets », il se ferait jeter, et je ne pense pas que, malgré ta défense des amateurs, tu admirerais le dessin de cet album.

    Je suis tout à fait d’accord sur le fait que le web ne doit pas être la chasse gardée des pros, et, pour moi, un site au code médiocre mais au contenu intéressant vaudra toujours plus que le contraire. Personnellement, je regrette la première époque du web, où celui-ci comportait de nombreux sites « amateurs » mal codés mais au contenu très riche portés par une seule personne (un exemple : http://www.astrosurf.com/luxorion/). Ces sites sont aujourd’hui pour la plupart disparus, hélas.

    Il est bien que la création soit accessible à tous, mais dans tous les domaines d’expression, l’acquisition de savoirs et de savoir-faire est un préalable indispensable : pas question d’écrire des romans, de peindre des tableaux ou de faire des photos de qualité sans apprentissage. C’est aussi le cas pour le web. Aussi, faire croire, comme Adobe veut le faire avec Muse, qu’on peut « créer » en faisant l’économie de l’acquisition des savoirs et savoir-faire nécessaires est un énorme mensonge, un mensonge pratiqué par toute l’industrie du logiciel depuis ses débuts pour fourguer ses produits : le mythe du logiciel libérant la créativité et n’exigeant aucun savoir et savoir-faire pour créer.

    « Sauf que les enfants peignent, les amateurs peignent et même si il font des bouzes, il se font plaisir… »

    Je ne suis pas entièrement d’accord avec toi. C’est sans doute vrai pour la plus grande partie des « amateurs », qui restent toujours au même niveau, mais ce n’est pas le cas pour tous : certains veulent faire de meilleures peintures, de meilleures photos, de meilleurs textes, tout comme un sportif veut améliorer ses performances, pour sa propre satisfaction… et certains peuvent vouloir faire des pages web de meilleure qualité. Encore faut-il qu’ils aient la possibilité d’apprendre. Mais le discours d’Adobe les convaincra qu’aucun apprentissage n’est nécessaire, Muse les fera acquérir de mauvaises habitudes dont ils auront du mal à se dégager, et son interface graphique sera un écran qui les empêchera de comprendre la réalité de ce qu’ils font, qui ne leur permettra pas de progresser. Et que feront-ils lorsqu’ils seront confrontés à des différences de rendu entre navigateurs ou à des différences d’implémentation de propriétés CSS3 ? Ils seront plantés, tout simplement.

    « @draeli, c’est pas dur à comprendre qu’une bonne partie des gens ça les intéresse pas la qualité du code, lui ce qu’il l’intéresse c’est utiliser, communiquer, mettre en ligne. Pas plus. »

    Mais les gens que tu évoques ne créent plus de sites web persos depuis longtemps : trop compliqué, coûteux (hébergement), chronophage à créer, à maintenir et à faire évoluer. Ils publient leurs articles sur Blogger, leurs photos sur Flickr, et leurs vidéos sur YouTube ou Dailymotion, le tout sans jamais voir le moindre code, ou pire, ils sont sur Facebook. Ces gens n’ont fait des sites web persos que parce qu’à l’époque, ces services n’existaient pas, et que faire un site, en codant avec le Bloc-notes ou avec un FrontPage ou un Dreamweaver piraté était alors la seule option pour s’exprimer en ligne. Peut-être aussi ont-ils laissé tomber parce que déçus de la comparaison de leurs créations amateurs avec les sites pros et les blogs.

    Non, ces gens ne sont pas concernés par Adobe Muse, et si Muse était gratuit et n’était utilisé que par des particuliers pour réaliser leurs sites persos, ce ne serait qu’un moindre mal.

    Mais le cœur de cible d’Adobe n’est pas et n’a jamais été le grand public mais les graphistes. Adobe suit simplement les tendances de la création web, et en réponse au déclin du Flash au profit de HTML5/CSS3/JS, elle sort Muse à destination des graphistes qui créaient auparavant des sites en Flash et qui sont maintenant contraints de passer à HTML5/CSS3/JS et qui sont allergiques au code.

    Adobe trompe tout simplement ces gens en leur fourguant très cher (vu la médiocrité du produit, ce sera toujours trop cher) un soft censé leur permettre de réaliser (je cite Adobe) « des sites web uniques, de qualité professionnelle, conformes aux derniers standards web ». Et avec ce logiciel, on verra probablement des graphistes qui faisaient auparavant des sites en Flash faire des sites HTML5/CSS3/JS avec des techniques nous ramenant aux premiers âges du web (du texte en image à l’époque de @font-face !), et qui, ce faisant, tromperont leurs clients. Au final, on aura des gens trompés et des gens trompés qui en tromperont d’autres. Et tromper les gens, c’est MAL.

  17. Kesta, le

    « Imaginez 5 sec que pour faire une mise en page destinée au print aujourd’hui, il faille tout coder… que pour retoucher une image ou faire un montage, il faille aussi tout coder…

    Je comprends depuis peu le coup du code propre, je passe bcp de temps à mettre en ligne des .doc ou .pdf en html/php et oui j’aime bien que ça soit tout bien rangé.

    Je n’y connais pas grand chose cependant mais je trouve ça d’un archaïsme hallucinant. Rien que sous Smultron qui semble être un bon éditeur, y a même pas (du moins à ma connaissance), la possibilité de mettre des balises en favoris afin de pas les retaper à chaque fois, dingue… heureusement on peut les fermer via un pomme+t, ouf…

    Alors il est où le soucis d’avoir un code dégueulasse quand on a pas à y mettre les mains ? C’est une vraie question. Ça engendre quels types de problèmes (je parle de vrais problèmes et pas de IE qui affiche mal une page) ? Pourquoi vous le dîtes dégueulasse ? Seulement parce qu’il est tout en vrac ?

    Parce qu’on m’a déjà sorti l’argument du temps de chargement des pages, mais là lol quoi… les mêmes personnes me foutaient alors des images en jpeg à 300 ko alors qu’elles pouvaient en faire 50, et n’utilisaient pas le png ou le gif pour des images contenant seulement quelques couleurs.

    Perso j’imagine bien qu’un jour on aura droit à un logiciel ou on aura plus besoin de taper une ligne de code, qu’on fera des sites pro en utilisant un logiciel de type mise en page, et qui correspondra aux besoins d’une majorité, laissant un marché de niche pointu pour les codeurs. »

    (c’est de la part de JPTK).
    Cordialement, Merci.

  18. thierry, le

    @Kesta :
    « Parce qu’on m’a déjà sorti l’argument du temps de chargement des pages, mais là lol quoi… les mêmes personnes me foutaient alors des images en jpeg à 300 ko alors qu’elles pouvaient en faire 50, et n’utilisaient pas le png ou le gif pour des images contenant seulement quelques couleurs. »

    Dans le domaine du design web, comme dans tous les domaines, il y a une foule de crétins dogmatiques. Ceux-ci répétèrent mécaniquement les Dix Commandements du Design Web, s’auto-congratulent de détenir la Vérité, d’être des Purs, des Élus, les Meilleurs des Meilleurs, etc., etc., et sont incapables de la moindre réflexion. Oui, il y a des gens qui te disent pondre un code super-optimisé, conforme aux Standards du Web (qu’ils écrivent et prononcent avec majuscules) et qui vont te mettre des images pas du tout optimisées ou utiliser une librairie JavaScript pour réaliser un effet qui peut être obtenu avec quelques lignes de CSS. Trouver des interlocuteurs intelligents n’est jamais facile, quel que soit le domaine.

    « Alors il est où le soucis d’avoir un code dégueulasse quand on a pas à y mettre les mains ? C’est une vraie question. Ça engendre quels types de problèmes (je parle de vrais problèmes et pas de IE qui affiche mal une page) ? Pourquoi vous le dîtes dégueulasse ? Seulement parce qu’il est tout en vrac ? »

    Un code bien pensé permet de résoudre de multiples problèmes, et pas seulement d’afficher une page correctement dans IE.

    Comparons avec l’architecture. Tu vois ces immeubles de bureaux récents dans lesquels plafonds, planchers, cloisons, vitrages, câblage, etc. sont clippables, enlevables, ajoutables sans toucher à la structure ? C’est parce qu’ils sont dès le départ conçus pour ça. On peut y effectuer un tas d’aménagements sans jamais toucher à la structure portante.

    Un site web, c’est pareil. Les sites web évoluent, et ils doivent être conçus pour évoluer avec un minimum d’opérations. Question de temps. Question de coût. En principe, tous les grands sites web comme Yahoo!, Google, MSN, etc., sont conçus comme ça.

    Si ton site a une structure bien pensée, tu peux effectuer des modifications de layout considérables sans jamais toucher à la structure des pages. Déplacer le menu vertical de gauche à droite des pages ? Une modification de quelques lignes dans la feuille de style du site. Transformer ton menu vertical en menu horizontal ? Une autre modification de quelques lignes dans la feuille de style du site. Évidemment, il y a des limites. Si tu veux transformer ton menu vertical ou horizontal en menu déroulant, tu devras modifier la structure, mais le truc est de créer la structure la plus évolutive possible.

    À l’opposé de ces immeubles conçus pour évoluer, tu as des immeubles conçus une fois pour toutes en fonction d’un design particulier, sans possibilité d’évolution. Mais ils doivent tôt ou tard être modernisés. Et alors, c’est le bordel. Il faut défoncer les murs, les planchers, les plafonds, il faut tout raser et tout reconstruire. Ça prend du temps. Ça coûte de l’argent.

    Pour les sites web, c’est pareil. Il m’est déjà arrivé de devoir refaire des sites statiques de A à Z, sans rien pouvoir réutiliser du code initial, en devant faire des copier/coller des contenus depuis le navigateur.

    Et ce n’est même pas gratifiant, et l’augmentation du prix (quand il y a augmentation du prix) ne compense absolument pas l’allongement du temps de refonte.

    Bon, alors qu’est-ce qui est préférable ? Une structure conçue pour évoluer ou une structure absolument pas conçue pour ça ? Mais réaliser une structure du premier type sans connaissance du code, là, faut pas rêver.

    http://blog.60questions.net/2007/08/ne-jetez-pas-le-bebe-avec-l-eau-du-bain/
    http://www.yoyodesign.org/doc/accessites/visual-vs-structural/

    « Perso j’imagine bien qu’un jour on aura droit à un logiciel ou on aura plus besoin de taper une ligne de code, qu’on fera des sites pro en utilisant un logiciel de type mise en page, et qui correspondra aux besoins d’une majorité, laissant un marché de niche pointu pour les codeurs. »

    Faut arrêter avec ce mythe du logiciel qui rend créatif et qui ne demande aucun prérequis pour être utilisé correctement. Ça n’existe pas. Ça ne peut pas exister. Tu peux aussi bien rêver d’un traitement de texte qui te transformera en romancier. Et d’ailleurs, à propos de traitement de texte, logiciel censé pouvoir être utilisé par tout le monde, faut pas rêver non plus : si tu veux vraiment utiliser un traitement de texte à fond, correctement, au maximum de ses possibilités, tu n’y arriveras pas sans une vraie formation de mise en page.

    Dans le domaine du design web, c’est tout simplement impossible pour une multitude de raisons. En voici deux :

    – Le mode graphique de l’éditeur web n’affiche pas les pages web de la même façon que les navigateurs. Il y a quelque temps, j’ai testé l’affichage d’un site avec menu fixed dans Dreamweaver CS3. Hé bien, ce Dreamweaver était tout simplement incapable d’afficher correctement cette page web avec menu fixed. Quel est l’intérêt d’un éditeur web graphique incapable d’afficher correctement les pages web ?

    – Depuis l’avènement de CSS3, le langage CSS compte des centaines de propriétés et de valeurs. Beaucoup de ces propriétés sont encore provisoires, doivent être précédées d’un préfixe constructeur et peuvent évoluer dans leur syntaxe, et de nouvelles propriétés et valeurs CSS sont constamment implémentées dans les navigateurs. Toutes ces propriétés et valeurs et leurs diverses syntaxes éventuelles ne sont évidemment pas disponibles dans les options d’un Dreamweaver ; il faut tout simplement les connaître, et ça demande une veille constante.

    http://blog.goetter.fr/post/13837141633/pourquoi-on-napprend-pas-css
    http://www.hteumeuleu.fr/maitrise-complete-integration-plus-possible/

    Bon, comme je l’ai dit, on peut regretter (et je le regrette) que la conception web demande de plus en plus de prérequis et soit de moins en moins accessible aux amateurs, mais c’est malheureusement une constante dans tous les domaines d’expression.

  19. Kesta, le

    @thierry :

    Ok, merci thierry pour cette réponse si pertinente et pour moi relativement enrichissante, et pour toutes ces informations, je prend note.

    Je n’ai pas la prétention de vous contredire sur certains sujets trop pointus pour moi, néanmoins je reste convaincu de certaines choses.. (par exemple avec le temps et le progrès voir apparaitre un logiciel ergonomique bien pensé avec macros ou même automatisations voire interprétation intuitive de codage, où l’on n’aurait plus besoin de taper une seule ligne de code) et pour celles dont je suis moins convaincu, l’angle de vue reste pour moi le même.

    Mais merci pour toutes ces précisions qui m’ont éclairé.
    Cordialement.