« Ce genre d’obsession »

Vu ce matin sur Reddit, un extrait d’une interview de Penn Jillette, magicien professionnel, publiée initialement par Game Informer en 2009 :

Vous savez, quand j’avais 15, 16, 17 ans, je passais 5 heures par jour à jongler, et je passais peut-être 6 heures à sérieusement écouter de la musique. Si j’avais 16 ans aujourd’hui, je passerais surement ce temps à jouer à des jeux vidéo.

Le truc que les personnes âgées ne comprennent pas, c’est que – si vous n’avez jamais écouté Bob Dylan, et que quelqu’un vous le fait découvrir pendant 15 minutes, vous n’allez pas rentrer dedans. Vous n’allez simplement pas comprendre. Vous devez passer des heures et des heures pour comprendre la forme, et la même chose est vraie pour le jeu vidéo.

Vous n’allez pas simplement regarder un FPS où vous tuez des zombies et comprendre les nuances. Il y a une quantité énorme d’arrogance et d’orgueil quand quelqu’un peut regarder quelque chose 5 minutes et le rejeter. Que vous parliez de jeu vidéo ou de musique classique, vous ne pouvez pas le faire en 5 minutes. Vous ne pouvez pas écouter Le Sacre du Printemps une fois et comprendre tout ce que faisait Stravinsky.

Il me semble que vous devriez au moins avoir la politesse de dire que vous n’y connaissez rien, plutôt que de dire que ce que font les autres est mal. Le cliché de l’enfant passionné qui ne va pas dehors et joue juste à des jeux vidéo est totalement faux. Et ça vaut aussi pour l’enfant passionné qui lit des bandes dessinées et qui devient un génie, et ça vaut aussi pour l’enfant passionné qui écoute chacune des chansons que Led Zeppelin a sorti.

Ce genre d’obsession chez un adolescent de 16 ans n’est pas moche. C’est magnifique. Ce genre d’obsession va conduire à un adulte de 30 ans sophistiqué qui a des connaissances sur cette forme d’art.

Comme beaucoup d’informaticiens, je pense « être tombé dedans quand j’étais petit » en grande partie grâce aux jeux vidéo. Dans mon cas, c’était au début des années 90s à l’âge de 8-9 ans.

Au départ, je ne faisais que jouer (notamment à Doom et Alone in The Dark, ce qui en retrospective n’était quand même pas très malin de la part de mes parents). Mais rapidement, ça a éveillé ma curiosité, et ça m’a poussé à apprendre plus de choses. J’ai appris à me servir de lignes de commande pour parcourir des dossiers et lancer des jeux. Puis j’ai appris à copier des disquettes et graver des CD. Et puis j’ai appris les différentes protections possibles sur un CD-Rom, et comment les contourner. Et puis j’ai appris à faire des maps sur Half-Life. Et puis j’ai appris comment les uploader sur Internet pour les partager avec le monde entier. Et puis j’ai appris comment créer des pages web pour partager ma passion du jeu vidéo.

Et puis je suis devenu intégrateur.

C’est ce genre d’obsession qui m’a conduit aujourd’hui à faire un métier que j’aime. Et bien que ce métier n’existait pas quand j’étais petit et que j’ai commencé à développer cette « obsession », c’est exactement ça que je voulais faire.

Bonus : Si vous aimez la magie, et puisque cet article part d’une citation de Penn Jillette, je vous invite très chaudement à regarder ce tour de Penn et Teller.

  1. Nico, le

    Idem pour moi, ce sont mes petits paysages fait sous Terragen 0.6 (à l’époque) qui m’ont amené à créer mon premier site personnel.

    Finalement, j’ai tellement aimé ça que j’en ai fait mon métier qq années plus tard.

    Quand aux paysages sous Terragen, ça m’a amené à faire des animations, et certains extraits sont passés dans une émission d’Ushuaïa.

  2. Yvain Liechti, le

    J’ai eu quasiment le même parcours.
    J’ai commencé à jouer à Diablo2 vers 13ans puis j’ai découvert qu’on pouvait modifier nos perso avec des éditeurs (cheat). Ceci m’a mener à toucher directement au code binaire (hexadécimal en l’occurrence).
    J’ai ensuite partagé ces infos à ma communauté de jeu et ainsi créé mes premières pages web. Peu à peu je me suis détaché du jeu et j’ai continué à faire des pages web. Aujourd’hui, je suis intégrateur et si mes parents m’avait interdit de jouer en ligne à l’époque, je n’aurait certainement jamais trouvé ma voie.

  3. Bartdude, le

    Je pense que toutes les « obsessions », quelles qu’elles soient, doivent cependant être surveillées. Car pour produire un adulte « sophistiqué », je pense qu’une certaine ouverture est nécessaire. En tout cas, personnellement, je trouve fort peu intéressant les gens capable de s’exprimer uniquement sur leur passion, quand-bien même je partagerais celle-ci.
    J’espère que mon gosse, quand j’en aurai un, aura des centres d’intérêts variés et pas 1 seul à l’obsession. Car même si celui-ci lui apporte plein de choses ou lui ouvre une voie professionnelle insoupçonnée , je trouve dommage, voire risqué, de se focaliser sur une seule chose…